La mission française d'information parlementaire sur l'Iran a
acquis la certitude que le programme nucléaire de Téhéran a des visées
militaires. Les
Israéliens le disent haut et fort depuis longtemps. Mais l'Agence
internationale pour l'énergie atomique a longtemps tergiversé, laissant
presque à l'Iran le bénéfice du doute. Le député socialiste Jean-Louis
Bianco, en a, lui, «la certitude» : le programme nucléaire iranien a
des visées militaires. Pire : il pourrait produire sa première bombe
atomique entre 2009 et 2010. C'est l'une des principales
conclusions du rapport de la commission des affaires étrangères, dont
la mission d'information sur l'Iran a planché pendant un an sur le
dossier et recueilli les témoignages de nombreux experts, en Iran et
ailleurs. «Les Iraniens ont enrichi 1 600 kilos d'uranium mais
sont incapables de fournir une réponse, de produire un projet concret
lorsqu'on les interroge sur l'avancée de leur programme civil.
Pourquoi ?», demande Jean-Louis Bianco, qui a présidé la mission.
Autre information : «Téhéran possède les plans de la bombe nucléaire,
sans doute obtenus grâce à la filière pakistanaise. Les Iraniens ont
aussi développé un programme de miniaturisation de la bombe.» Enfin,
les missiles balistiques longue portée Sahab 3, équipés de nouvelles
têtes, placent désormais à portée de tir iranien Israël et l'Europe.
«Je ne crois pas que l'atome rend sage» Plusieurs
fois menacé de destruction par le président iranien Mahmoud
Ahmadinejad, l'État hébreu est le premier concerné par le développement
du programme nucléaire de Téhéran. Mais les pays arabes sunnites
s'inquiètent eux aussi de l'influence grandissante de l'Iran chiite
dans la région. En relançant la prolifération nucléaire, la bombe
atomique iranienne signerait également la fin du TNP, le traité de
non-prolifération. «Ahmadinejad, je l'espère, n'est pas assez fou pour
frapper Israël. Je pense que la bombe nucléaire reste une arme à visée
politique pour l'Iran. Mais je ne crois pas dans la thèse qui consiste
à dire que l'atome rend sage», prévient Jean-Louis Bianco. Pour
le député socialiste, qui juge la situation «très préoccupante»,
l'unique porte de sortie consiste à ouvrir des négociations «sans
préalable», c'est-à-dire sans placer le dossier nucléaire au sommet de
l'agenda. «La société iranienne est complexe. Contrairement à
Ahmadinejad, elle n'est pas antisémite. Les Iraniens veulent d'abord
assurer leur sécurité. Il faudrait leur proposer un grand deal incluant
le développement économique et la stabilité de la région», poursuit-il. Le problème, c'est que le temps presse. L'année 2009 sera cruciale. Entre
les élections à Tel-Aviv et Téhéran et
la tentation israélienne de frapper militairement les
installations nucléaires iraniennes, la marge de manœuvre des capitales
occidentales est étroite. Le nouveau président américain a annoncé son
intention de
négocier avec le pouvoir iranien.
Sa tâche ne sera pas facilitée par la Russie et la Chine, membres
permanents du Conseil de sécurité des Nations unies, qui ont toujours
joué un jeu double et pernicieux vis-à-vis du programme nucléaire
iranien. En Israël, beaucoup craignent que Téhéran utilise ces
nouvelles négociations pour gagner du temps, jusqu'à ce qu'il soit trop
tard pour empêcher son projet d'aller à son terme. Conscient de ce
risque, le président de la mission d'information estime cependant qu'il
n'y a aujourd'hui «pas d'autre alternative».