Les Mauvaises Gens

Récompensé par le prix de libraires spécialisés pour «Chute de vélo», puis par le festival d'Angoulême pour le présent volume (prix du public ou de la critique je ne sais plus...) Davodeau se signale définitivement comme un auteur engagé.

180 pages de dessin en noir et blanc, nuancés de gris qui explore une contrée du Maine-et-Loire familière à l'auteur puisqu'il y a passé son enfance : Les Mauges.

Terre d'Eglise, terre de tradition où quelques patrons firent fortune au début du siècle. Le militantisme de Davodeau déjà observé dans "Rural" se porte ici sur l'histoire des luttes ouvrières. La lecture de cette BD est poignante et l'hommage vibrant. A gauche toute certe, mais si l'histoire est pleine de partis pris elle n'en reste pas moins sensible. Les témoignages sont émouvants : qu’il s’agisse de celui de la mère de l'auteur [Davodeaux parle de l'histoire de ses parents] entrée à l’usine à l’âge de 14 ans et qui a su profiter des activités proposées par les Jeunesses Ouvrières Catholiques, de celui de son père qui va passer du statut ouvrier à celui de professeur de lycée, ou encore celui de ce discret, mais dynamique, aumônier de la Jeunesse Ouvrière Chrétienne, qui avait assimilé les accélérations de l’époque (les années soixante) : un prêtre qu’Etienne Davodeau a retrouvé 40 ans plus tard.

Le dessinateur se met donc en scène et l'histoire n'en est que plus sensible, dans une forme de "bd-reportage" construite en flash back, ce qui lui donne du rythme jusqu'à la dernière page. Une grande bd à ranger à côté du Combat Ordinaire de Manu Larcenet.

Je confirme la qualité de cet album, toujours très engagé, comme toujours chez Davodeau.

Même si je ne partage pas ses idéaux politiques, je trouve ici son histoire touchante et très intéressante. Elle fait voir les militants syndicalistes d'un autre oeil. On suit un peu l'histoire locale de la CGT et de la CFDT entra autres et on se rend tout à fait compte que ceux qu'on (je) peux parfois (souvent) taxer de râleurs et de casse-pieds ont eu un rôle prépondérant dans la modernisation et l'humanisation de l'entreprise et de la société.
J'avoue qu'aujourd'hui c'est quelquechose que j'ai tendance à oublier et ça ne fait pas de mal de le rappeler.

Pour résumer: excellente BD, à conseiller à tous vos élèves en éducation civique messieurs les profs!